vendredi, mars 27, 2009

Ne pleure pas

Gamine, quand tu pleurais, elle te donnait à manger. Tu avais une drôle de manière de pleurer. Dès que l'envie te prend, tu le fais, sans retenue, sans gêne, les yeux rouges et le nez qui coule, comme ça devant tout le monde. On lisait dans tes larmes, on a fini par les comprendre, la faim, la fatigue, la soif, l'adolescence, le sommeil, les coups de tête. Tu pleurais de tout et de rien, comme un bébé. Tu es belle quand tu pleures, tu sais. T'as les yeux gonflés, tes beaux yeux noirs s'illuminent, comme une perle. T'as les joues qui s'arrosent, s'empourprent. Tes gestes de colère qui vont dans tous les sens. Ta frustration de ne pas dire ce que tu veux, de ne pas pouvoir crier, tout renverser, ta violence inassouvie. C'est qu'on n'a pas appris à parler dans cette famille, on n'a pas l'usage de la langue, tout passe par les yeux, même les engueulades des vieux, même le rire, même l'amour, on lit tout là-dedans, on en a tous de très beaux d'ailleurs, une panoplie de couleurs, toutes différentes, aussi belles les unes que les autres.

Mais aujourd'hui, ils sont loin, et je suis désarmée. Je suis impuissante, je suis frustrée de ne pas les voir, de ne pas savoir, de ne pas deviner ton envie, ta colère, de ne pas lire dans tes larmes. Je marche depuis deux heures en mâchant mes mots. J'ai la tête qui tourne tellement j'ai parlé, vite, trop vite, j'ai tellement de choses à te dire. Si seulement tu étais là. Si seulement tu pouvais les voir. Si seulement..

Je n'ai pas écrit ce bout de texte pourri pour que tu pleures. Tu sais, c'était un lundi, deux jours après mon arrivée. J'avais déjà passé deux jours à dormir dans ses bras, à parler à ses yeux. Les siens sont uniques, vert miel, un peu irisé, et ils disent toute sorte de choses. Regarde les, tu verras qu'elle va bien. C'est comme ça que j'ai su tenir, moi. Je ne regardais pas plus haut que ses yeux, on n'a pas besoin de voir le reste. Essaye. Tu t'y perdras. Tu n'auras plus envie de pleurer, tu n'auras plus envie de les quitter, pas une minute, pas une seconde. Voilà la technique, au cas où tu en aies besoin. Comment n'y ai-je pas pensé avant?

Je ne l'aurais jamais écrit, ce putain de texte, si je savais. J'ai envie de te serrer dans mes bras, de te laisser me faire tes gros bisous baveux sur la joue, et le cou jusqu'à ce que je commence à hurler, comme d'habitude. Je n'ai pas la langue de voix, ni celle des mots. Je veux te harceler de questions, savoir si tu vas bien, si tu as séché tes larmes, si tu en as parlé à quelqu'un. Je suis impuissante, incapable. Vingt minutes au téléphone sans avoir oser.
J'ai marché pendant deux heures avant de pondre mes mots ici. J'espère que tu le liras bientôt. Arrête de pleurer. Elle va bien, ne t'en fais pas.

vendredi, mars 06, 2009

Blog Pub

Rue du chat qui pêche

Lâchez vos Com's! (lol)

Lien